Travailler dans un CIC : un travail d'équipe varié présentant un intérêt social

Certains profils s’avèrent difficiles à pourvoir au sein des directions et services de la Police Fédérale. Pour combler les déficits et attirer des candidats aptes, tant internes qu’externes, la Police Fédérale va mettre en 2023 un accent particulier sur l’#EmployerBranding. Ce thème figurera par exemple au cœur de son calendrier 2023, et sera décliné chaque mois en mettant à l’honneur un (ou plusieurs) collègue(s) d’une direction ou d’un service qui recherche un profil déterminé.

En février, focus sur les services d’Information et de communication des arrondissements (SICAD). Un SICAD réunit d’une part le Centre provincial d'information et de communication (CIC) où les appels d’urgence arrivent et sont traités, et d’autre part le Carrefour d'information d'arrondissement (CIA), le centre de gestion de l’information policière. Les inspectrices Christel Engels et Anke Peerlinck nous font découvrir les salles d’appel des Centres d’information et de communication (CIC) de Flandre orientale et de Bruxelles, où des call-takers et des dispatchers sont disponibles 24h/24 pour prêter assistance à des personnes en détresse.

Travailler dans un CIC : un travail d'équipe varié présentant un intérêt social

Centre névralgique des services de secours

Tous les CIC de notre pays doivent faire face à un déficit en personnel. De nombreuses places de call-takers (qui reçoivent les appels d’urgence) mais aussi de dispatchers (qui dirigent les équipes sur le terrain) restent vacantes. Il est difficile de recruter le personnel adéquat, surtout en Flandre (provinces d’Anvers et de Flandre orientale) et à Bruxelles. La Wallonie est également confrontée à des déficits, mais dans une moindre mesure.

Le CIC est placé sous l'autorité d'un chef de service, qui dépend lui-même du chef de service du SICAD. Ce dernier dépend du directeur-coordonnateur (dirco) de la direction de coordination et d'appui (DCA).

Le CIC de la Police Fédérale, la centrale 101, traite les appels en vue d’une aide policière. Il y a 11 CIC, un par province. La centrale d’urgence 112 (CU 112) reçoit quant à elle les appels nécessitant l’aide urgente d’une équipe médicale et des services d’incendie. Notre pays compte 10 centrales d’urgence 112. Chaque année, ces centrales traitent pas moins de six millions d’appels. La salle d’appel est le centre névralgique des services de secours, qui sont accessibles 24 heures sur 24 et sept jours sur sept.

CIC - INP Christel Engels

L'Inspectrice Christel Engels gère au mieux les collègues sur le terrain. 

“J’ai choisi de rester”

L’inspectrice Christel Engels travaille au CIC de Flandre orientale depuis près de six ans. “Enfant, je rêvais de travailler à la police”, confie-t-elle. “Après une longue carrière, d’abord dans l'enseignement puis dans le milieu bancaire, j’ai entamé la formation policière à 42 ans. Ma fille étant devenue assez grande, j’ai décidé de me lancer. Les douze mois de formation ont été intenses mais j’en ai tiré une grande satisfaction. Via la mobilité des aspirants (voir plus loin), je me suis retrouvée au CIC, tout à fait contre mon gré, car je voulais être sur le terrain en tant qu’inspectrice et non rester assise toute la journée derrière un écran. Je devais respecter un temps de présence d’un an... Je n’ai pas choisi de faire mes débuts ici, mais j’ai bel et bien choisi d’y rester ! J’aime mon travail et ne veux plus en changer.”

 

“Toujours au cœur de l’action”

Le travail de Christel en tant que dispatcher consiste à diriger les équipes sur le terrain par radio. Après avoir reçu une fiche d’intervention sur son écran de la part d’un call-taker, elle doit vérifier l’urgence d’une intervention, l’aide exactement nécessaire et les équipes disponibles sur le terrain. “Afin de garantir la sécurité maximale des collègues intervenant sur le terrain, il importe qu’ils soient correctement dirigés. Je dois donc leur transmettre un maximum d’informations.

Le rôle du dispatcher est non seulement de dispatcher, mais aussi de suivre l’intervention. J’ai une multitude de choses à faire, appeler un service de dépannage, envoyer sur place un entrepreneur de pompes funèbres..., et je demande régulièrement un SITREP (situation report). Dans la salle d’appel, nous sommes toujours au cœur de l’action, pas physiquement mais mentalement. Assis sur notre chaise, au chaud et en sécurité, nous examinons chaque situation comme si nous étions à bord d’un hélicoptère, et gardons une vue d’ensemble. Si RAGO (nom de l’hélicoptère de la police) est mobilisé, nous pouvons suivre les images en direct. On ne s’ennuie jamais ici. Les choses sont toujours très dynamiques. Être capable de faire plusieurs choses à la fois est indispensable !"

Call-taker et dispatcher

La situation dans chaque CIC est à peu près la même, chacun ayant son propre équilibre et ses propres sensibilités. Chaque CIC compte en ses rangs des call-takers et des dispatchers. En Flandre orientale, les postes de call-takers sont occupés par du personnel de police CALog (CALog signifie cadre administratif et logistique), des membres du personnel du SPF Intérieur et du personnel de police opérationnel. Les dispatchers appartiennent quant à eux au personnel de police opérationnel ayant le grade d’inspecteur, ou au personnel CALog. Le CIC de Flandre orientale est divisé en trois zones de compétence, les Arros, comme Christel et ses collègues les appellent : l’Arro de Gand, l’Arro de Termonde et l’Arro d’Audenarde.

“Lors de chaque shift, on se voit attribuer l’un de ces trois Arros”, poursuit-elle avec enthousiasme. “Je me vois souvent confier Gand car je suis originaire de cette région et connais bien le territoire. Nous assurons le dispatching pour toutes les zones de police de la province de Flandre orientale (sauf les zones de police d’Alost et de Gand), ainsi que pour un certain nombre d’entités fédérales telles que la Police de la Navigation, la Police des Chemins de Fer et la Police de la Route. Je suis principalement dispatcher, mais il m’arrive également souvent d’assurer la fonction de call-taker. Contrairement au call-taker, le dispatcher doit pouvoir assumer les deux fonctions. Le call-taker est en contact direct avec le citoyen et peut avoir en ligne toutes sortes de personnes... En posant les bonnes questions et en suivant son intuition, le call-taker recueille de nombreuses informations, qu’il peut ensuite transmettre au dispatcher. Le fait de pouvoir calmer les personnes en détresse et leur dire que l’aide est en route est source de grande satisfaction. Il faut parfois également faire preuve de pédagogie et pouvoir gérer les ‘clients’ réguliers...

"Les fonctions de dispatcher et de call-taker offrent une expérience différente mais l’aide aux personnes (en difficulté) occupe toujours une place centrale, qu’il s’agisse de citoyens ou de collègues sur le terrain.”

“Briser la peur de l’inconnu”

“Le manque de personnel auquel les CIC sont confrontés est pour moi un mystère”, explique Christel. “Vous ne m’entendrez jamais me plaindre. Chaque journée est différente. On ne sait jamais à quel point la journée sera chargée et quelles interventions devront être gérées, mais par expérience, on sait à quoi s’attendre certains jours/moments. Peut-être les 12 heures de shift ou le travail de nuit effraient-ils les éventuels candidats ? Personnellement, ça ne me dérange pas mais chacun vit le travail de nuit différemment, bien entendu. Lors de l’établissement du planning de service, nos souhaits et aspirations sont pris en compte, dans la mesure du possible. Pour les shifts de nuit, on peut donc donner ses préférences et choisir, par exemple, de travailler plusieurs nuits d’affilée, mais ce n’est pas obligatoire. Parfois, j’assure trois shifts de 12 heures par semaine (de sept jours), parfois quatre ou seulement deux. On est donc régulièrement à la maison pendant la semaine, ce qui permet de libérer du temps pour... donner des cours, par exemple. (N.D.L.R. : Christel enseigne la radiocommunication aux aspirants à l’école de police PAULO dans le cadre de la formation de base)

Je dis toujours qu’il faut briser la peur de l’inconnu. Nous travaillons chaque fois avec des collègues différents, ce qui permet de faire connaissance avec tout le monde et d’avoir de nombreux sujets de conversation durant la nuit, par exemple. Pour moi, un grand avantage est que lorsque le shift est terminé, on enlève son casque et on s’en va. On tourne le bouton et notre remplaçant prend le relais. Cela permet d’avoir l'esprit tranquille. Dans mon emploi précédent, ce n’était jamais fini. L’absence d’un collègue tombé malade se fait sentir immédiatement car toutes les chaises de la salle d’appel doivent être occupées 24 heures sur 24 et sept jours sur sept. Les collègues sont-ils rebutés par le fait de devoir faire plusieurs choses à la fois et de devoir maîtriser les nombreux programmes ? Tout cela s’apprend, petit à petit. Et avant cela, on suit une formation. Ma formation a eu lieu à Louvain et a été pour moi une période agréable : on apprend à connaître son métier et ses collègues.”

CIC

Pouvoir lâcher prise

“Il faut pouvoir supporter le fait de faire un travail où l’on ne peut pas sauver tout le monde. Un travail dans lequel il faut parfois vivre avec une lourde charge émotionnelle”, peut-on lire sur le site web 112.be. “En effet”, confirme l’inspectrice Engels. “Il faut pouvoir mettre un peu de côté l’aspect émotionnel et apprendre à lâcher prise. Suite à une intervention dans le cadre d’un grave accident de la route ou de graves faits de violence intrafamiliale, par exemple, nous ne savons pas comment cela s’est terminé. Les victimes s’en sont-elles sorties ? La dame est-elle en sécurité, les enfants aussi ? C'est parfois un inconvénient de notre métier, mais on s’endurcit au fil des ans. Les personnes qui se sentent trop impliquées éprouveront plus de difficultés, une fois le shift terminé, à fermer la porte et passer à autre chose. Nous faisons de notre mieux pour envoyer de l’aide aussi vite que possible et garantir la sécurité de nos collègues. Heureusement, nous ne voyons pas de nos propres yeux comment une personne s’est jetée sous un train, par exemple. »

S’ils en ont besoin, les membres du personnel du CIC peuvent faire appel au Stressteam de la Police Fédérale (pour le personnel de police) et aux assistants sociaux du SPF Intérieur (pour les call-takers neutres).

Un travail varié

Celui qui pense que travailler au sein du CIC est ennuyeux se trompe, poursuit Christel. “Les possibilités d’évolution sont multiples. Vous pouvez varier votre travail en devenant, par exemple, coach, le bras droit du SupCo (superviseur coordinateur). Pour cela, il faut avoir plusieurs années d’expérience. En tant que coach, vous entretenez davantage de contacts avec les zones de police concernant les tâches à accomplir. Un jour, vous pouvez être coach et le lendemain dispatcher. Vous pouvez également vous plonger dans la RTI (real time intelligence, voir plus loin), devenir encodeur ou prêter un appui dans le cadre de stages. Ce sont des responsabilités supplémentaires pour celui qui le souhaite. Je prête moi-même un appui dans le cadre de stages et suis responsable de plusieurs autres projets. Je mets ainsi à profit mon expérience antérieure pour organiser le team building. Les tâches peuvent donc être très variées !"

CIC

L'Inspectrice Anke Peerlinck travaille déjà depuis 2007 au CIC Bruxelles.

CIC Bruxelles : unique en son genre

L’inspectrice et SupCo Anke Peerlinck compte parmi les ‘anciens’ du CIC Bruxelles. Elle a commencé à y travailler en 2007 en tant que call-taker et membre du personnel CALog. Souhaitant assurer également le dispatching, elle n’avait pas d’autre choix que de s’inscrire à l’école de police pour devenir inspectrice. “Je voulais continuer à travailler au CIC en tant que dispatcher. Si l’on décidait un jour que tous les policiers devaient travailler sur le terrain, je redeviendrais membre CALog pour pouvoir rester ici !”

Au sein du CIC Bruxelles, qui diffère des autres CIC à bien des égards, il y a principalement une pénurie de call-takers neutres (engagés par l’Intérieur) et d’inspecteurs principaux. “Notre call-taking est le plus difficile du pays”, poursuit Anke. “Non seulement en raison du nombre importants d’appels et du public, mais aussi du fait que nous ne dispatchons pour aucune zone de la Police Locale.

Ce dispatching s’effectue à un endroit différent, ce qui complique la concertation entre le call-taker et le dispatcher pour les zones de police bruxelloises. Ici, pas moins de six postes sont pourvus pour le dispatching de la Police Fédérale : déploiement d’une arroseuse, d’un hélicoptère, de la cellule Personnes disparues..., tout part de chez nous. Le CIC Bruxelles fait également office de back-up pour les autres CIC et prend aussi tous les appels (des quatre coins de la Belgique) passés via Internet. Le call-taking n'est pas toujours la fonction la plus appréciée mais elle est le plus souvent sous-estimée.”

Une excellente école

Les membres du personnel qui entrent en service au CIC par le biais de la mobilité des aspirants – une règle qui permet aux unités n’ayant pas suffisamment de candidats d’être prioritaires pour l’affectation des nouveaux inspecteurs de police – le considèrent souvent comme une punition (comme l’explique Christel ci-dessus). "Toute personne souhaitant être sur le terrain devrait d’abord travailler un certain temps au sein d’un CIC", poursuit Anke. “Travailler dans un CIC, qui compte dans ses rangs un large éventail de membres du personnel et de grades, est source d’enrichissement. Vous êtes le maillon entre le niveau local et le niveau fédéral, disposez d’une vue d’ensemble unique et faites connaissance avec toutes les entités de la Police Fédérale : la Direction de protection (DAP) pour la protection des VIP, par exemple lors de la visite de Joe Biden dans notre capitale, la Police Fédérale de la Route (WPR) pour l’escorte de délégations étrangères lors de sommets européens... Tout appui fédéral sur le territoire bruxellois est lancé depuis notre salle d’appel. On apprend tellement plus ici que dans une zone de police. La personne qui quitte le CIC emporte avec elle un excellent bagage. L’ambiance est toutefois telle que la plupart des collègues restent... ou reviennent !"

L'inspectrice Anke Peerlinck

Changement d’image en cours

Contrairement aux idées reçues, travailler dans un CIC n’est pas un emploi de fin de carrière. “Il n’est par ailleurs absolument pas nécessaire d’avoir une expérience du terrain”, poursuit l’inspectrice Peerlinck. “Je pense que les CIC pâtissent encore largement de leur image, mais un changement s’opère. Sur le plan technique, des progrès considérables ont été réalisés. Les personnes intéressées par l’informatique et les logiciels sont au bon endroit. Nous bénéficions de l’allocation de Bruxelles-Capitale et ceux qui ne connaissent qu’une seule langue peuvent apprendre l’autre langue nationale en interne et recevoir une prime linguistique mensuelle après avoir réussi un test Selor. Ce brevet linguistique peut être une plus-value pour ceux qui souhaitent postuler un emploi dans une zone de police bruxelloise, par exemple. Et on peut le dire : nous avons un beau salaire.”

Trouver ensemble des solutions

“Lors de chaque shift, nous recevons facilement entre 80 et 120 appels, mais il y en a généralement beaucoup plus”, conclut Anke. “Les jours où l’activité est à son comble et durant les week-ends, les call-takers gèrent entre 600 et 800 appels par shift. Mais il y a aussi des moments calmes, que vous pouvez mettre à profit pour étudier, par exemple. Vous pouvez également vous consacrer à la RTI, la real time intelligence ou intelligence en temps réel. Grâce à la gestion de caméras ANPR (automatic number plate recognition, c’est-à-dire la reconnaissance automatique de plaques d’immatriculation) et d’autres caméras intelligentes, le CIC peut apporter une plus-value. Nous avons, par exemple, pu établir des liens entre des transports de drogue pour la Police Judiciaire Fédérale. La technologie des salles d’appel, le CAD ou computer aided dispatching, permet des recherches avancées dans le système, qui nous ont souvent permis d’aider des personnes en difficulté, de sauver des vies ou de résoudre un vol en flagrant délit. Si chaque maillon de la chaîne fait son travail, nous pouvons engranger de belles réussites et trouver ensemble des solutions. Collaborer pour obtenir de beaux résultats… quelle satisfaction !”

Envie de rejoindre l’équipe du CIC ?

N’hésitez pas à consulter le site web du Selor, des offres d’emploi de call-taker y sont régulièrement publiées.

Le site jobpol.be publie quant à lui les offres d’emploi pour les fonctions opérationnelles et CALog au sein d’un CIC.