Statistiques de criminalité 2019 : nouvelle hausse marquée de la cybercriminalité, le total reste stable

La Police Fédérale a publié aujourd’hui les statistiques policières de criminalité pour l’année 2019. Même si le nombre total de faits enregistrés reste stable, on observe en particulier une nette hausse de la cybercriminalité. Ce basculement d’une criminalité « hors ligne » vers une criminalité « en ligne » est une réalité depuis plusieurs années et s’est manifesté en 2019 d’une façon plus prononcée que jamais. Les vols et les extorsions, traditionnellement la catégorie de faits la plus représentée, connaissent en revanche un léger recul. Tous les chiffres sont disponibles sur www.stat.policefederale.be

Statistiques de criminalité 2019

Depuis l’an 2000, la Police Fédérale publie chaque année des rapports portant sur les statistiques de criminalité. Ces chiffres présentent le total des faits enregistrés dans la Banque de données nationale générale (BNG) par la Police Locale et la Police Fédérale. Ils permettent de mettre en évidence l’évolution de la criminalité en Belgique au cours des dernières années, mais doivent être interprétés avec une grande prudence. Davantage de signalements d’un certain type de criminalité ne signifie pas forcément que cette forme de criminalité apparaît plus fréquemment : cela peut aussi bien résulter d’une plus forte propension de la population à déclarer les faits, ou d’une évolution des techniques d’enquête.

 

Un recul de la criminalité à l’échelle internationale

En 2019, le nombre total de faits enregistrés est resté stable par rapport à 2018.* La Police Locale et la Police Fédérale ont enregistré au total 878 354 procès-verbaux pour des faits s’étant produits en 2019. Sur le plus long terme, une diminution se dessine bel et bien. En 2011, les services de police avaient au total enregistré 1 063 271 faits, soit 17,4 % de plus qu’en 2019.

Cette tendance générale à la baisse de la criminalité s’observe partout dans le monde. La littérature parle d’international crime drop. Aucune raison évidente ne se dégage pour expliquer cette évolution. Celle-ci résulte probablement d’une combinaison de plusieurs facteurs. L’évolution des stratégies et des techniques policières peut ainsi jouer un rôle positif en ce qui concerne la détection de la criminalité. Songeons par exemple à l’évolution permanente des possibilités en termes d’analyse ADN, de localisation GSM, de travail policier basé sur l’information, mais aussi d’un renforcement du travail de proximité ou des campagnes de prévention. Parallèlement, la protection des biens s’améliore sans cesse, notamment grâce à la mise en place d’un « bouclier » de caméras (ANPR) à l’échelle nationale, aux systèmes d’alarme et de traçage des véhicules plus performants, au gardiennage privé, etc. Il se peut enfin que la présence accrue de la police et de l’armée dans les rues, dans la foulée des attentats terroristes, joue également un rôle.

« J’accueille avec satisfaction ces chiffres à nouveau positifs, que nous devons aux techniques mises en œuvre par la police », déclare le ministre de la Justice Koen Geens. « La police est, elle aussi, une organisation flexible qui travaille dans une optique future proof. L’évolution permanente des possibilités d’analyse ADN et de recherche criminalistique enrichit l’éventail de ces techniques. Le budget consacré à ce domaine par le SPF Justice augmente d’année en année. En 2019, ce montant est passé à 3,5 millions d'euros. Cela s'explique notamment par la grande importance des analyses d'ADN dans les enquêtes judiciaires et par le nombre croissant de demandes de ce type d'analyses. Il nous faut poursuivre résolument ces efforts, pour non seulement élucider la criminalité, mais aussi la prévenir. »

La cybercriminalité continue de progresser, à un rythme sans cesse croissant

Même si, au plan général, on observe un recul de la criminalité, les chiffres de la cybercriminalité continuent d’exploser. En 2019, 32 943 cas de « criminalité informatique » (atteintes à la sécurité d’un système informatique ou à l’intégrité des données stockées dans un système informatique) ont été recensés, soit 29,2 % de plus qu’en 2018. Ces dernières années déjà, une hausse s’observait pour cette catégorie de faits, mais de façon moins spectaculaire. Entre 2017 et 2018, la hausse a été de 18,1 %.

Graphique 2005-2019

C’est en particulier la multiplication des cas de phishing (vol de données d’utilisateurs, par exemple en attirant ceux-ci vers un faux site web) qui attire à nouveau singulièrement l’attention. En 2019, 2 365 faits ont été enregistrés. En comparaison avec 2018, la hausse atteint les 80,3 %.

Outre la criminalité informatique au sens strict, l’ICT peut aussi jouer un rôle dans le cadre d’infractions « classiques ». La fraude sur Internet est ainsi particulièrement fréquente, avec 24 617 faits enregistrés en 2019, soit une augmentation de 28,2 % par rapport à 2018. Cette infraction recouvre toutes les formes d’escroquerie commises via Internet : fraude dans le cadre des ventes et achats en ligne, fausse loterie, fraude à l’amitié, fraude à l’identité…

Ici encore, cette augmentation est probablement due à plusieurs facteurs. Il y a d’une part la vie sociale, qui se déroule de plus en plus en ligne, y compris pour les achats, la gestion bancaire et la vie professionnelle, ce qui contribue au basculement progressif d’une criminalité « hors ligne » vers une criminalité « en ligne ». D’autre part, cette augmentation peut aussi s’expliquer en partie par une plus forte propension à déclarer les faits : les victimes obtiennent probablement de plus en plus de possibilités pour déposer plainte, et arrivent heureusement à franchir le pas. Le Moniteur de sécurité de 2018 a en effet indiqué que seuls 22 % des victimes d’escroquerie par Internet déclaraient les faits. Pour se faire une idée de l’évolution de la propension à déposer plainte, il faudra attendre une prochaine édition du Moniteur de sécurité, mais nous pouvons supposer que de nombreux cas de cybercriminalité restent non répertoriés.

 

Les cambriolages dans les habitations à un niveau plancher

Tout comme les années précédentes, les vols et les extorsions restent les types de faits les plus fréquents : ils représentent plus d’un tiers de la criminalité totale enregistrée. Le nombre de vols enregistrés est reparti légèrement à la baisse par rapport à 2018. Les vols de voiture (-11,8 %) et les car-jackings (-10,6 %) ont ainsi diminué. Les (tentatives de) cambriolages connaissent également une tendance à la baisse en termes généraux. En 2019, 47 021 cambriolages dans des habitations ont été recensés : une diminution de 10,3 % par rapport à 2018 et le niveau le plus bas jamais enregistré. Les cambriolages dans des entreprises et des commerces ont eux aussi diminué de 10,1 % par rapport à l’année précédente, et les cambriolages dans des institutions publiques ou étatiques (y compris notamment les écoles) de 15,4 %.

Pour les vols à la tire, en revanche, les chiffres repartent à la hausse (+10,8 % par rapport à 2018). C’est au sein de la Région de Bruxelles-Capitale que l’augmentation est la plus prononcée.

 

« Plus de bleu en ligne »

« L’analyse de ces Statistiques de criminalité et du Moniteur de sécurité présenté l’été dernier nous mène à un constat notoire », indique le ministre de la Sécurité et de l’Intérieur Pieter De Crem. « Même si ce sont les infractions comme les cambriolages dans les habitations qui ont le plus d’impact sur le sentiment de sécurité de nos concitoyens, ces statistiques confirment que la criminalité se déroule de plus en plus en ligne, à un rythme toujours plus soutenu. C’est par exemple le cas de la fraude liée aux achats en ligne, de la fraude à l’identité et du « phishing ». Ces constats tendent à confirmer l’analyse que j’ai déjà faite : nous devons continuer à miser sur « plus de bleu en ligne », notamment en investissant dans les formations supplémentaires et spécialisées qui s’imposent à cette fin ».

 

Retrouvez l’intégralité des rapports et des chiffres sur le site web www.stat.policefederale.be

* Ces chiffres reposent sur les PV judiciaires enregistrés dans la BNG au 25 avril 2020. Une infime augmentation n’est donc pas à exclure, par exemple en cas d’enregistrement tardif de PV pour des faits survenus en fin d’année. Certains faits, par exemple en matière de mœurs, ne sont pas toujours signalés immédiatement à la police. La Police Fédérale part de l’idée que ces chiffres sont complets à 98 %.